La pire maladie qu'on puisse attraper c'est celle qui te met le cerveau en état de certitude, en position de donneur de leçon, en détenteur de la vérité. Attraper ce mauvais microbe est une sorte de malédiction car il endort l'intelligence à tel point qu'il donne la certitude d'être le seul à connaitre la vie, toutes les expériences possibles. Il te fait croire qu'il n'y a qu'une seule lecture possible de la vie, qu'une seule façon de percevoir la lumière et les couleurs. La tienne.
Bref, tu deviens le vieux con, le vieux singe à qui on n'apprend plus à faire la grimace.
Quelle tristesse au fond.
J'en ai croisé quelques specimen, car malheureusement, cette espèce est répandue, se densifie chez les hommes de plus de 40 ans. Comme les soirées sont pénibles. Comme les discussions sont pauvres.
Rarissimes sont les êtres capables de se laisser étonner ou même d'écouter. C'est un don divin que celui du recul sur soi-même. Lâcher son ego et sa légende personnelle, construite de toute pièce pour mieux continuer à rester con, n'est visiblement pas donné à tout le monde.
Quand tu croises un homme beau de l'intérieur, tu ne peux que vouloir le regarder toute ta vie. L'admirer même dans les petites choses de la vie de tous les jours. Même vider un poisson devient un moment précieux avec celui là.
Tu n'as plus besoin de folles choses avec celui là, sa seule présence à tes côtés te rempli de quelque chose de bon. Tu deviens meilleur à son contact et ton monde est solaire.
Tu te demandes comment tu as pu t'éloigner à tel point de ce genre de compagnie si longtemps; comment tu as pu endurer certains cerveaux courts et qui plus est souvent énervés, hystéro-paranos, colériques, imbéciles, sombres, égoïstes, radins, phantasmeurs ou handicapés du coeur.
La sidération ne tient jamais très longtemps: tellement inutilo-barbant de replonger dans tout ce passé chiasseux dont le seul intérêt est celui de te pointer tout ce que tu ne veux plus jamais côtoyer. Écrire passe le balai. Des fois, comme de la merde accrochée à ta chaussure, à certaines occasions, de vieilles humeurs viennent empester au loin. Laisser les chaussures sur le balcon. Reléguée loin des yeux, loin du nez, la puanteur finira bien par ne même plus vouloir exister.